Bon alors moi je n’ai pas trop de temps libre là tout de suite mais… tant pis! Le temps je le prends, Clément tu m’as donné envie!!!
EXODUS
Péplum réalisé par Ridley Scott.
On a beaucoup écrit sur le sujet et ce, parfois même, avant la sortie du film : un casting annoncé comme « raciste » (Egyptiens essentiellement joués par des « blancs »), plusieurs choix d’interprétation discutables (Torturo en tête, Weaver aussi, …), une BA pas très convaincante, des FXs sans âme, un montage laborieux (les « coupes » produisent parfois un effet de chapitrage), des interdictions de diffusion dans certains pays du Magreb, etc… etc…
Au final, force est d’avouer que les impressions générales ne sont pas très élogieuses, c’est le moins qu’on puisse dire…
Et pourtant j’y suis allé!!
Happé par une certaine forme de curiosité face à cette grande vague « critique » mais surtout ô combien séduit par papy Scott dès que le vieux briscard s’attèle au « religieux » et à la politique. J’ai toujours criée haut et fort mon admiration pour son Kingdom of Heaven (version longue only!!) qui, malgré le monolithique Orlando Bloom, constitue sans doute ce qui s’est fait de mieux sur le thème de la justification des croisades. Impossible de ne pas citer LA réplique de Saladin qui résume toute la pensée de Scott sur le sujet. Juste après ceci:
Balian (Chevalier) : What is Jerusalem worth?
Saladin (Sultan) : Nothing. And everything!!
Alors EXODUS? Là où certains évoquent une nouvelle mode hollywoodienne (Noé comme figure de proue), moi j’y vois une grande cohérence par rapport à la filmo du réal. Une façon de pour lui de s’attaquer directement à la source : le récit biblique brut. Soyons clair dès à présent, EXODUS n’a rien d’un très grand film dans sa forme actuelle, mais son approche du « religieux » est particulièrement intéressante et plutôt subtile! Scott réussi à faire un film engagé mais qui ne créé pas la polémique (pour rappel l’interdiction du film ne fait suite qu’à un principe religieux basé sur la non représentation figurée du prophète, du Dieu - rien de neuf!), un film qui peut plaire (et déplaire) aux croyants ET aux athées. En gros une oeuvre qui cultive le respect ET l’insolence!
Le respect:
La première partie du film met en place de manière claire et assez classique les différentes « forces » en présence qui vont s’affronter pendant 2H30. Petite nuance quand même sur le fait qu’on ne s’attarde absolument pas sur les origines (cachées) de Moïse.
Concernant la photographie, on est chez Scott, donc celle des intérieurs est forcément splendide comme souvent. Niveau pictural, rien de franchement révolutionnaire. C’est beau, propre, un poil glacial pour les raisons que vous imaginez bien… Et les quelques milliers de figurants n’y changent pas grand chose. Mais on est pas dans la surenchère ou l’effet tape à l’œil. La 3D reste discrète même au niveau de la PDC.
Du point de vue narratif EXODUS suit un cheminement extrêmement similaire à celui de GLADIATOR: Grande bataille en ouverture - Deux prétendants pour un trône - La filiation sanguine comme ticket d’entrée pour l’un - La descente aux enfers pour l’autre, suite au décès du père - La reconquête d’un nouveau pouvoir - L’affrontement final des deux prétendants.
Les dix plaies d’Egypte sont bien là, les FXs aussi. Plaisant à regarder mais sans frissons.
En revanche, la dernière (sans FXs) est clairement la plus réussie, travail sur le son oblige!!
Même constat concernant les 30 dernières minutes.
L’interprétation de Joel Edgerton pleine de retenue par rapport au sec et très puissant Yul Brynner constitue une belle surprise. Ici la puissance n’est que le fait du rang et non celle d’un homme qui n’a clairement pas le charisme voir même les compétences afin d’accéder au titre de Pharaon.
L’insolence:
Elle prend sa quintessence dans le partis pris de la représentation complètement novatrice du « messager/Dieu »! Sans doute les scènes les plus intéressantes (et personnelles) du film. Ici, la toute puissance divine, et incontestable, du Dieu de la version DeMille (1957) laisse place à beaucoup d’arrogance dans laquelle on peut même y trouver un soupçon de perversité. Oui vous lisez bien, voici donc le Dieu selon Scott!
Et Moïse n’est pas en reste. Si la partition de Bale fait parfois penser à celle d’un certain Bruce W prisonnier de ses vieux démons, Charlton Heston doit se retourner dans sa tombe pour le reste. Car ici, Dieu ne veut pas d’un homme de paix! Il veut un général! Un homme de guerre. Un soldat qui va armer les hébreux, les entraîner au combat pour ensuite frapper et affamer le peuple égyptien!
Frapper le peuple pour toucher les pouvoirs en place… Ça ne vous rappelle pas quelque chose qui fait froid dans le dos??? Si ÇA, ce n’est pas de l’insolence, je ne vois pas!!!
Assimiler Moïse à un terroriste sans que l’on brûle des cinémas… Peut-être est-ce en ça que réside une partie du talent de Ridley ?!?!
L’insolence, on la retrouve aussi de manière plus discrète dans le déchaînement des différents événements « divins » : la rencontre avec Dieu, les plaies, la traversée de la mer rouge. La « puissance » est toujours au rendez-vous mais en même temps systématiquement accompagnée par une petite touche de désamorçage de l’aspect surnaturel. C’est léger mais présent. Pas de spoils, rassurez-vous. Retenez-juste que chez Scott vous ne verrez pas de bâton frapper le sol afin d’ouvrir une mer déchainée…
Un Moïse qui a l’intelligence de se méfier du genre humain et qui émettra des réserves sur le devenir du peuple hébreu : « un peuple uni car en fuite, mais qu’adviendra-t-il de toutes ces tribus lorsqu’elles retrouveront leur liberté?? »
EXODUS : GODS AND KINGS
RELIGION ET POLITIQUE. Il n’existe aucun état religieux sans qu’il n’y ait de politique…
Un film qui rentre forcément en résonance avec notre époque actuelle (ce qui était déjà le cas avec Kingdom). Surtout en ce jour sombre… :-\